Invité
| Sujet: I write for the same reason I breathe. /PV ma douce/ Mar 6 Sep - 18:55 | |
| Un mot. Puis un autre. Et encore un.
Vous me direz que la technologie a depuis longtemps permis aux nouveaux hommes que nous sommes de retranscrire ce que la parole assène directement à l’écrit. Les appareils, toujours plus sophistiqués et chers, se battent en duel sur le marché de la technologie, pour que notre vie en soit simplifiée. Je promeus moi-même ce genre d’engins an sein de la Sainte Trinité. La perte du temps est bien l’une des choses qui m’agace le plus. Le temps n’est pas indéfini, c’est un nectar précieux qui nous a été accordé. Les gens n’ont pas le droit de le gâcher.
Moi, je ne suis pas « les gens ». Je suis au-dessus. Par conséquent, je ne m’inclus pas dans les règles que je dicte. Prenez-moi pour un despote, cela m’amuse. De plus, l’ennui m’est encore plus insupportable que le gâchis. Rien de tel que l’ennui pour commettre un acte de folie. Je ne peux pas me permettre de laisser mon esprit dériver dans les méandres de l’inconnu. Qui sait, peut-être que je serais pris sous e coup d’une idée insensée, que je pourrais regretter bien plus tard. Garder les pieds sur terre est la meilleure chose qu’un homme de mon rang et de ma trempe puisse faire. Le rêve n’a pas sa place ici, car cette civilisation est si parfaite que rien ne pourrait l’améliorer. Au contraire, le rêve ne ferait que la détériorer.
Je n’écris rien de bien palpitant. Une lettre. C’est un jugement que je rends sur une affaire à laquelle j’ai assisté. Cela concernait un jeune homme qui se dressait contre la Sainte Trinité et son culte. Contre Tetra, Delta, et Moi. Un jugement officiel a été rendu dans une salle publique, qui était d’ailleurs bondée. Tout comme moi, certaines personnes luttent contre l’ennui en observant ses idiots se faire condamner. C’est aussi une bonne leçon pour quiconque tenterait de me faire de l’ombre. De Nous faire de l’ombre. En privé, il a bien sur été interrogé de manière plus simple. Torture est un mot barbare qui a disparu de notre vocabulaire, les gens ne savent souvent plus ce que c’est. Il s’agit de L’Interrogatoire. Ce mot cause dans le plus simple des esprits le plus puissant des frissons.
J’en arrive à la dernière ligne. J’ai décidé aujourd’hui d’écrire en majuscule. Cela m’amuse de savoir que les gens qui tiendront ce bout de papier entre leurs mains devront se plier en quatre pendant dix minutes pour comprendre ce que j’ai écrit. Bien sur, ils n’oseront rien me dire, ils ont trop peur. C’est l’un des points forts à être considéré comme une Entité Religieuse vivante. La parole de Dieu est universelle. La mienne ne doit en aucun cas être remise en question.
Je signe, puis j’appelle un coursier. Un petit jeunot qui arrive au pas de course. Dès qu’il me voit, ses yeux bleus s’illuminent d’une flamme nouvelle. Il me vénère. Il prend la lettre entre ses doigts tremblants, comme si je lui remettais un calice contenant mon sang –il s’agit d’une très vieille histoire faisant parti des mythes de l’Humanité-, et s’en va illico presto. Quant à moi, qui est terminé de m’occuper, il ne me reste plus qu’à vaquer jusqu’à la bibliothèque.
En chemin, je croise quelques personnes. Celles-ci s’inclinent devant mon passage majestueux. Je me suis toujours demandé comment les autres religions ont pu survivre à la lassitude. Les premières religions du Monde, celles qui ne laissaient aux croyants que l’image miroitante d’un Dieu invisible. Leurs ordres n’étaient dictés que par des textes de loi, rédigés eux-mêmes par des messies qui se croyaient investis d’une mission. Et leur foi leur était inculquée par des soi-disant relayeurs au pouvoir divin. Comment continuer de croire à une religion pendant près de 2000 ans sans avoir la preuve concrète de son existence ? Cela est tellement incongru, qu’il m’arrive parfois de douter de la véracité des propos.
La bibliothèque de la Sainte Trinité, Lieu de la Vérité et du Mensonge. Nous ne savons plus distinguer le conte de la réalité. Chaque écrit est semblable à un autre. Les érudits se chargent de traduire les plus anciens ouvrages qui ont été écrits dans une langue à présent oubliée. Je sais qu’un de ces livres a été récrit récemment. Je sais tout ce qu’il se passe à l’intérieur du palais. Je vais le consulter, pour voir s’il mérite d’être rendu public ou s’il doit être confiné dans notre salle.
En entrant, quel n’est pas ma surprise en voyant déjà une autre personne dans la pièce, réservée aux Trois Capitaines et à leurs plus proches conseillers –tel mon très cher Maximilien-. Il ne s’agit que de ma Delta. Je lui porte quelques surnoms affectueux, dignes du plus sulfureux des amants, et pourtant notre relation n’est en aucun cas de ce type là. Il s’agit plutôt de ma progéniture, l’être que j’ai confectionné selon le moindre de mes désirs, et que j’ai volontairement gardé si pure. Ma chérie, celle que je protégerai des opportunistes.
« Ma douce Delta, pourquoi n’es tu donc pas dans ta chambre ? »
Ma voix se fait douce et enchanteresse. Je me sens légèrement coléreux, mais je ne m’énerve que très rarement face au résidu de mon Andromède. Je n’aime pas ne pas savoir exactement où la Capitaine se trouve. Elle ne doit en aucun cas échapper à la Surveillance. Je l’aime tellement, mais sa pureté ne verrait qu’un monde sale, tandis que Tetra et Moi voyons le monde parfait, celui que nous avons perpétué au prix de nombreux sacrifices.
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